sexta-feira, 31 de janeiro de 2014



   Encore aujourd'hui, on refuse de m'écouter lorsque je dis que l'inconscient pourrait bien être autonome. Cette idée fait peur. On considère généralement l'inconscient comme une fosse à fumier, où rien ne se trouve que ne soit déjà passé par la conscience. Pour Freud, l'inconscient ne renferme rien d'autre que de vieilles choses oubliées et passées: un vieux chapeau, quelques lignes, un journal, voilà tout l'inconscient. On se refuse absolument à lui reconnaître une existence propre ou une quelconque influence sur les choses. Et pourquoi pas?
(...) On éprouve naturellement une peur animale à l'idée de ce que l'inconscient pourrait faire surgir de nous.
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Jung, Carl Gustav. Sur l'interprétation des rêves. Paris: Albin Michel, 1998, p 112.
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     À vrai dire, je garde toujours à l'esprit une autre possibilité, naturellement aussi très aventureuse, à savoir que le concept temporel serait effectivement une donnée de l'inconscient, mais il s'agirait là d'un temps qui se verrait en quelque sorte disloqué, de sorte que l'inconscient aurait la faculté de dépasser le cours normal du temps, percevant ainsi des choses qui n'existent pas encore. La substance de toute chose est en effet déjè présente dans l'inconscient. On rêve par exemple souvent d'événements qui ne se dérouleront que le lendemain ou même encore plus tard. L'inconscient ne se préocupe pas de notre perception habituelle du temps, ni de la relation causale des choses entre elles. L'étude de séries de rêves permet également de le vérifier: en effet, la série de rêves ne représente pas une suite chronologique d'événements au sens de notre perception habituelle du temps. Il est pour cette raison très difficile d'y repérer un avant et un après. Si nous voulions caractériser l'essence même de la série de rêves, nous ne dirions pas qu'elle représente une série chronologique (...) mais qu'elle se rattache à un centre non identifiable à partir duquel les rêves rayonnent. (...)
   Du fait que les rêves ne parviennent à la conscience que l'un après l'autre, nous leur attribuons une certaine qualité temporelle et les relions entre eux de façon causale. Or il n'est pas démontré que la suite réele d'un premier rêve ne parvienne qu'ultériurement à la conscience. La série qui nous paraît chronologique n'est pas la véritable série. Cette explication ne représente en fait qu'une concession de notre part à notre perception habituelle du temps. Un nouveau thème peut très bien apparaître dans un rêve, avant de disparaître pour céder de nouveau la place à un thème antérieur. La véritable configuration du rêve est radiale: les rêves rayonnent à partir d'un centre, et ne viennent qu'ensuite se soumettre à l'influence de notre parception du temps. Les rêves se subordonnent en réalité à un noyau central de signification. 
Jung, Carl Gustav. Sur l'interprétation des rêves. Paris: Albin Michel, 1998, 21 - 22.