quarta-feira, 15 de abril de 2015

Nota - O longo poema Le Ceneri di Gramsci , escrito em1954, integra um dos primeiros poemários de Pasolini que adota o título desse mesmo poema. Reproduz-se aqui um excerto desse texto  numa  tradução de José Guidi, tradução que o próprio autor supervisionou.


                      VI

Je m'en vais, je te quitte, dans le soir,
qui, malgré sa tristesse, tombe si doux,
pour nous, vivants, dans la clarté cendrée

qui se raccroche au quartier dans la pénombre.
Et le travaille. Le grandit, en évide
les alentours, et, plus loin, le rallume

d'une vie furieuse, où le rauque
roulement des tramways, les cris humains,
dialectaux, forment un concert trouble

et absolu. Et on sent bien que pour ces êtres
vivants, au loin, qui crient, qui rient,
dans leurs véhicules, dans leurs mornes

ilôts de maisons où s'évanouit
le don perfide et expansif de l'existence -
cette vie n'est qu'un frisson;

présence charnelle, collective;
on sent l'absence de toute religion
véridique; non point vie, mais survie

- plus joyeuse, peut-être, que la vie - comme
en un peuple d'animaux, dont le secret
orgasme ignore toute autre passion

que celle du labeur de chaque jour:
humble ferveur, que vient parer d'un air de fête
l'humble corruption. Plus se fait vain

-en cette trêve de l'histoire, en cette
bruyante pause où la vie fait silence -

(...)

et le terreau des Abattoirs, il s'y imprègne
d'un sang fétide, et que partout
il remue détritus et odeur de misère.

La vie est bruissement, et ces gens qui
s'y perdent, la perdent sans nul regret,
puisqu'elle emplit leur coeur: on les voit qui

jouissent, en leur misère, du soir: et, puissant,
chez ces faibles, pour eux, le mythe
se recrée... Mais moi, avec le coeur conscient

de celui qui ne peut vivre que dans l'histoire,
pourrai-je désormais oeuvrer de passion pure,
puisque je sais que notre histoire est finie?


  Pasolini, Pier Paolo. Poésies 1953 - 1964. Paris: Gallimard, 2014, pp 37 - 43 ( Traduction de José Guidi).
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